mercredi 21 mai 2014

Régie publique : l'Agglo de Montpellier se jette à l'eau


Régie publique : l'Agglo de Montpellier se jette à l'eau

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"Une régie soumise à la vigilance des citoyens et des salariés"

                

René Revol : "Nous serons la collectivité qui sera passée le plus vite en régie publique." Photo Redouane Anfoussi.    
René Revol : "Nous serons la collectivité qui sera passée le plus vite en régie publique."    

 

René Revol, vice-président de l'Agglo, est en charge du retour à une gestion publique de l'eau (dans 18 mois) et de l'assainissement (18 mois plus tard).

René Revol, maire (PG) de Grabels, vice-président de l'Agglomération, a été chargé par le nouveau président (DVG) Philippe Saurel de mettre en place la régie municipale de l'eau. Retour sur cet événement avec un de ceux qui en ont été les plus fervents défenseurs et qui en devient donc la cheville ouvrière.

Pas un seul vote contre le retour en régie publique de l'eau, est-ce que c'est surprenant ?
Ca correspond à un mouvement général qui se produit en ce moment dans beaucoup de villes de France avec un argument de poids à Montpellier où la majorité des électeurs se sont prononcés pour ce retour en régie publique de l'eau et de l'assainissement. C'était marqué noir sur blanc dans le programme de celui qui a gagné les élections, dans le programme du Front de gauche et d'autres y compris dans celui du FN. Ce qui fait que dans la ville centre qui représente plus de la moitié de la population, nous avons reçu majoritairement un mandat du peuple pour le faire. Parmi les 14 élus qui se sont abstenus le 7 mai, on trouve les membres de l'UMP et les maires qui le 25 juillet dernier s'étaient prononcés pour la délégation de service public (DSP).

Cela signifie aussi que l'idée de l'eau bien commun fait son chemin ?
Je prends l'exemple de ma commune. Comme les contrats s'arrêtent en décembre 2014, en début 2013, j'avais proposé au conseil communautaire d'organiser un référendum citoyen sur le territoire de l'Agglo. On m'avait répondu : les gens ne sont pas intéressés, les élus peuvent trancher. Dans la commune dont je suis maire, Grabels, j'ai alors décidé d'organiser un vote populaire municipal. La participation a été de 50%. Pour un référendum de ce type, c'est énorme. Et 95% de ceux qui se sont déplacés se sont prononcés pour la régie publique. D'ailleurs au cours du débat contradictoire, les gens de droite étaient gênés pour défendre la DSP. La preuve est apportée - et on va s'en apercevoir cet été avec la sécheresse - que l'eau est un bien rare et qu'il doit être géré de manière collective et protégée.

Il y a quand même eu un semblant de manoeuvre au dernier moment quand Véolia a fait savoir qu'elle pouvait baisser le prix de l'eau de 50%.
Oui c'est assez ahurissant. Alors qu'on est en période de secret de la concurrence que garantissent les marchés publics, puisque les plis ne sont pas ouverts et qu'on ne connaît pas les offres, Véolia rompt le silence et prend le risque d'une annulation du marché en annonçant une baisse brutale du prix de 50%. Première remarque : Pourquoi ne l'avoir pas fait avant ? Y avait-il des marges aussi importantes prises sur le dos des consommateurs ? Deuxième remarque : c'est du dumping pour essayer de gagner un marché. Mais le prix ne suffit pas, il faut aussi garantir la pérennité de la ressource et la qualité du service. Véolia a voulu peser sur le débat de l'Agglo mais cela a eu exactement l'effet inverse. Les gens se sont tous dit que pendant des années ils avaient payé 50% de trop.

Est-ce qu'on peut évaluer la baisse qui résultera du retour en régie sur la facture ?
Je ne peux pas répondre précisément sur un dossier qui va être traité dans les mois qui viennent, mais la moyenne des baisses réalisées dans la totalité des villes qui l'ont fait depuis dix ans va de 20 à 30%... Ce qui prouve que la régie publique est moins chère que l'entreprise privée. Et cela parce qu'elle ne rémunère pas d'actionnaires, ne paie pas d'impôt sur les sociétés, ne cherche pas des marges financières, n'a pas la charge d'un siège... On voit bien qu'en l'occurrence on ne parle pas de coût du travail, mais que le problème c'est le coût du capital.

Une autre sorte de manoeuvre est qu'on a fait dire aux salariés qu'ils craignaient la régie...
Ce qui va être créé est une régie publique à autonomie morale et financière, ce qui signifie que les contrats en CDI seront de droit privé et la loi impose à toute collectivité qui reprend une DSP de reprendre tous les salariés. Ceux-ci conserveront leurs avantages acquis, c'est aussi une obligation légale. Il ne faut pas que Véolia ou tout autre prestataire utilise la période de transition pour régler ses comptes avec les salariés. Nous y veilleront. C'est pourquoi ce passage ne sera pas qu'administratif puisque nous mettons en place d'ici la fin juin un comité citoyen de suivi qui sera composé d'associations, d'élus, d'experts et de représentants des personnels. On ne passe pas à une régie où les élus dirigent tout, mais à une régie qui sera soumise à la vigilance des citoyens et des salariés.

La régie sera effective au 1er janvier 2016...
Effectivement nous allons très vite, on ne peut pas le faire juridiquement en moins de 18 mois mais nous serons la collectivité qui sera passée le plus vite en régie.

La précédente présidence avait estimé que c'était impossible...
Parce qu'elle préférait la DSP. En proposant une DSP de 7 ans, J.-P. Moure noyait le poisson et se refusait de fait à faire une régie. Pour moi il est tout à fait symbolique que la première délibération avec le seul point à l'ordre du jour d'une séance du conseil d'Agglo ait concerné la mise en régie.

Et l'assainissement ?
Notre engagement public est une régie publique de l'eau et de l'assainissement. Simplement techniquement et juridiquement il nous était impossible de le faire tout de suite. Donc nous ferons la régie de l'eau dans les 18 mois et dans les 18 mois qui suivent, la régie publique d'assainissement.

Toutes les communes de l'Agglo ne seront pas concernées ?
Les indemnités pour rompre les contrats seraient trop élevées, donc nous respecterons les échéances de ces contrats. La régie concernera toutes les communes dont les contrats s'achèvent de 2014 à 2017. D'autres ont des contrats se poursuivent jusqu'en 2021, notamment les communes qui sont liées à d'autres syndicats mixtes. Ces communes y sont représentées par l'Agglo. Les ressources en eau se jouent des frontières administratives et politiques. Il faut donc réfléchir à une cohérence sur tout le territoire. C'est pourquoi nous allons envisager de coopérer avec d'autres collectivités le Grand Pic Saint-Lou où le Lez prend sa source ou encore avec l'Agglomération du Pays de l'Or en ce qui concerne l'assainissement. On peut réfléchir à une politique de l'eau du grand Montpelliérain qui soit beaucoup plus cohérente, beaucoup plus coordonnée, beaucoup plus citoyenne.
Entretien réalisé par Annie Menras
 
 
http://www.lamarseillaise.fr/herault-du-jour
 

mercredi 7 mai 2014

TAFTA : un danger de plus pour l’eau …

TAFTA : un danger de plus pour l’eau …



Le projet d’accord de libre-échange transatlantique (TAFTA) en cours de négociation entre les Etats Unis et la Commission Européenne fait courir un risque sans précédent aux libertés et à la démocratie. En effet, il s’agir de rien moins, sous prétexte d’éliminer les obstacles au commerce, que de donner aux multinationales la capacité juridique de mettre en cause les décisions et initiatives des collectivités (états, régions, administrations). Les contentieux seraient traités par des tribunaux spécialement créés hors de toute juridiction nationale. Les lobbies dont l’efficacité redoutable s’appuie déjà sur des moyens puissants, une communication professionnelle ciblée et un chantage permanent à l’emploi pourraient, désormais, obtenir systématiquement gain de cause via l’engagement de procès auprès de ces instances. Toute réglementation nouvelle pouvant porter atteinte aux intérêts ou bénéfices d’une multinationale pourrait être l’objet d’une contestation judiciaire. Avec, à la clé, des indemnités faramineuses pour les collectivités rendant illusoire toute résistance.

Le projet (http://www.scoop.it/t/marche-transatlantique) stipule, d’ores et déjà, que les pays signataires assureront « la mise en conformité de leurs lois, de leurs règlements et de leurs procédures ». Autant dire que presque tous les secteurs d’activité (hormis le domaine culturel) sont concernés : agriculture, alimentation, énergie, transports, santé, … Les poulets traités à l’eau de javel, le bœuf aux hormones, les OGM, le gaz de schiste seront alors inévitables. Les processus démocratiques court-circuités deviendront inopérants. Les réglementations sociales et environnementales seront mises à mal. Il ne sera plus question de transition écologique vers un monde plus sain…




Le secteur de l’eau ne serait pas épargné. Les Véolia et Suez n’auront alors aucun mal à empêcher toute velléité de retour en régie publique. Toute tentative de contrôle ou d’amélioration de la qualité de l’eau distribuée ou du traitement des eaux usées sera rejetée comme contraignante ou coûteuse. L’implication des usagers, des associations ou des pouvoirs publics sur ces sujets sera considérée comme illégitime de fait. Le concept de l’eau « bien commun » sera à ranger sur l’armoire aux souvenirs. Le droit à une eau sans danger pour la santé, la revendication de la protection à la source, la communication transparente des analyses, l’exigence d’alerte publique en cas de pollution au-delà des normes, la révision des normes pour intégrer les nouveaux polluants et les progrès de la toximétrie, l’élimination des pratiques de mélange d’eaux polluées pour faire baisser la teneur en certains polluants, la prise en compte en amont de l’effet cocktail, l’alignement des coûts au plus bas et la pratique de tarifs sociaux… autant de prétentions d’un autre siècle et d’utopies dérisoires.



Nous ne voulons pas cela. Il est encore temps de manifester notre désaccord (par exemple sur http://stoptafta.wordpress.com/ ), d’inciter notre gouvernement à reprendre la main abandonnée à la Commission Européenne, de donner au Parlement Européen le contrôle sur la Commission, de voter et de voter avec discernement le 25 mars pour empêcher la conclusion de l’accord TAFTA.


Vincent Meyer
sur le blog : http://eaubeaujolais.wordpress.com